2015 – 2021 Etude palynologique du lac de Champex

Article paru en 2021 : https://doi.org/10.1007/s00334-021-00859-6

14 500 ans d’histoire de la végétation et de l’utilisation des terres dans la zone de montagne continentale supérieure au lac de Champex (Valais, Suisse)

Fabian Rey, Sandra O. Brugger, Erika Gobet, Romain Andenmatten, Andrea Bonini, Hannah Inniger, Corina Maurer, Nina Perret-Gentil-dit-Maillard, Julian C. Riederer, Oliver Heiri, Willy Tinner, Christoph Schwörer

Composite of the percentages of selected pollen types, microscopic charcoal and Sporormiella influx values (particles/ spores cm−2 yr−1), plant macrofossil and macroscopic charcoal concentrations (number of remains per 9 cm3, ≥ 200 µm) and the regional archaeology (grey horizontal bars). Empty curves represent the 10 × exaggerations. LPAZ local pollen assemblage zones, M macrofossils (sum). (a) Formed crystal rocks from the Mesolithic (ca. 7600–7400 BP, Verbier La Chaux “Pathiéfray”, Taramarcaz and Curdy 2013), (b) Middle Neolithic grave (ca. 4700–3100 BC, Sembrancher “Crettaz-Polet”, Wermus 1981), (c) Short axe, sword and axe from the Early and Middle Bronze Age (ca. 2000–1350 BC, Liddes, Voutaz and Rouyer 2013), (d) Late Iron Age (La Tène) vase from a grave (ca. 200–100 BC, Sembrancher, Curdy 2013), (e) Roman votive tablet (ca. AD 1–100, Col du Gd-St-Bernard, Wiblé 2008), (f) Adalbert I denarius from a grave (AD 1111–1137, Bourg-St-Pierre “L’Hospitalet”, El Sherbini and Elsig 2001)

Résumé (traduction RA RAMHA 2022)

Les forêts de la zone montagnarde continentale supérieure sont d’importants écotones entre les écosystèmes forestiers de basse altitude et subalpins. Une compréhension approfondie de la dynamique passée de la végétation à moyenne altitude est cruciale pour évaluer les déplacements altitudinaux passés et futurs des espèces d’arbres en réponse au changement climatique. Les sédiments lacustres du lac de Champex (1467 m d’altitude), un petit lac du canton du Valais, dans les Alpes de Suisse occidentale, ont été analysés pour reconstituer la végétation, l’utilisation des terres et l’histoire des incendies au cours des 14 500 dernières années en utilisant du pollen, des macrofossiles, des palynomorphes non polliniques et du charbon de bois. Les archives indiquent que la ligne des arbres avait déjà atteint la région de Champex pendant l’Allerød (12’050 av. J.-C.) mais qu’elle est descendue en dessous du bassin versant du lac pendant le refroidissement du Dryas récent (10’800-9’600 av. J.-C.). La reforestation a recommencé avec le bouleau et le pin sylvestre au cours de l’Holocène précoce, à 9’800 av. J.-C., en réponse au réchauffement rapide du climat. Les espèces d’arbres tempérées (orme, tilleul, chêne, érable) ont peut-être atteint l’altitude du lac pendant le maximum thermique de l’Holocène (vers 8’050-3’050 av. J.-C.). Les forêts mixtes avec  le sapin blanc mésophile étaient dominantes entre 5’550 et 3’050 av. J.-C. Les expansions massives de l’épicéa après 3’050 av. J.-C. et des fourrés d’aulne vert après 2’550 av. J.-C. ont été directement liées à l’augmentation des perturbations humaines. Les valeurs élevées de spores de champignons coprophiles, dont des sporormiella, et de pollen de céréales suggèrent l’existence d’une agriculture pastorale et arable sur le site à partir du Néolithique final/récent et de l’âge du Bronze précoce (dès 3’050 av. J.-C.). Nos données impliquent que la végétation à une altitude intermédiaire a été moins affectée par les activités humaines qu’à des altitudes plus élevées ou plus basses, mais que ces zones intermédiaires ont servi de stations importantes entre les établissements permanents dans les vallées et les cabanes alpines occupées de façon saisonnière à des altitudes plus élevées. Nous soutenons que le réchauffement climatique à venir entraînera des réorganisations radicales des écosystèmes de montagne.

À la fin du Moyen-âge, la construction d’un bisse depuis le Val d’Arpette voisin a dû entraîner des changements substantiels dans les écosystèmes du lac, puisque beaucoup d’eau riche en oxygène a été ainsi apportée. De même les apports de sédiments dans le lac ont été modifiés et des apports de tourbe provenant de l’érosion des marais situés au nord du lac se sont mêlés aux alluvions. A partir de cette époque, le lac a probablement été utilisé comme un réservoir naturel pour irriguer les prairies de la vallée autour du village d’Orsières.